L’épaisse couverture de l’ouvrage se referma, soulevant un nuage de poussière autour d’elle-même. Dépité, Haiko se leva, souffla la bougie qui éclairait la pièce, et quitta lentement cette dernière. Le crissement de la porte alerta la jeune femme qui veillait de l’autre côté.

« Alors, qu’ont donné vos recherches ? », s’enquit-elle auprès du Juunin, à la limite de la somnolence.

L’enfant des cendres fit non de la tête; sa déception n’avait d’égal que le nombre de journées qu’il avait passé, renfermé, seul, dans les archives de Suna. Le ninja s’apprêtait à quitter le bâtiment, lorsqu’il fut interpellé par l’archiviste.

« Vous savez, vous devriez aller jeter un œil dans les archives des autres villages; il arrive que, parfois, certains documents s’égarent, voire, que ces documents n’aient jamais été consignés dans leur pays d’origine. », affirma la jeune femme, soucieuse de l’état du Shinobi.

Le pays des roches. Après de longues journées de marche, le Yadomaru arriva dans les grandes forêts qui cernaient ces terres. Le village d’Iwa était sa destination, et en son sein, seules les archives l’intéressaient. Il était presque midi, lorsque le Sunajin pénétra dans les bois, d’un pas lent mais assuré. Le jeune homme aimait profiter du paysage et sa quiétude; la ville étant sa destination, il souhaitait jouir un maximum du calme qui régnait sur ses environs. Son bandeau de guerrier des vents cernait sa taille, indiquant clairement son affiliation aux forces de Suna.

Le Juunin était impatient d’arriver à destination afin de poursuivre ses recherches, cependant, le voyage avait été long et éprouvant. Ne pouvait-il pas s’arrêter, juste un instant, et s’imprégner de cette tranquillité qu’il appréciait tant ? Luttant contre sa curiosité, Haiko décida de s’asseoir momentanément et, s’adossant au tronc d’un arbre assez imposant, il s’exécuta. Le vent soufflait légèrement, et les seuls bruits audibles n’étaient que des gémissements d’animaux ou des craquements dans les feuilles. L’enfant des cendres ferma les yeux, se laissant bercer par cette ambiance relaxante, et, l’espace d’un instant, s’abandonna au sommeil.  

Le calme de la forêt fut néanmoins vite troublé par une étrange mélodie, émanant de la cime des arbres. Un air, qui malgré son indéniable qualité, n’en dérangeait pas moins le Sunajin, soucieux de trouver le sommeil en toute quiétude. Le Juunin demeura assis un instant, avant de se résoudre à reprendre la route, au détriment de quelques heures de repos. Cependant, une présence, nichée dans les feuillages, et probablement à l’origine de la musique qui se répandait dans les bois, éveilla son attention. Haiko stoppa ses pas, visiblement gêné par cette personne qui le surplombait; un simple musicien ne se serait pas amusé à grimper au sommet des branches pour jouer, aussi devait-il s’agir d’un ninja. Toutefois, l’enfant des cendres n’avait pas le temps de s’arrêter à chacune de ses rencontres avec un Iwajin. Il n’était venu que dans un seul but; éclaircir ses doutes, et ce grâce aux archives de la roche.

Après avoir lancé un bref regard en direction du lieu où il pensait que le musicien se trouvait, le Yadomaru reprit son rythme de marche. La question de son accès aux informations du village n’était pas tout à fait résolue; bien que les différentes forces du continent se retrouvaient désormais liées sous le signe de l’Alliance, les secrets des nations n’en demeuraient pas moins des secrets, et il n’était pas rare que certains shinobis continuent à les protéger durant ces temps de paix. Si jamais les forces de la roche venaient à en refuser l’accès au Sunajin, ce dernier se trouverait bien stupide d’avoir voyagé durant tout ce temps pour, finalement, ne rien obtenir. En ce sens, une conversation avec l’homme qui venait de troubler son sommeil ne pouvait qu’être bénéfique, mais le Juunin n’avait pour se faire pas besoin de faire quoi que ce soit. En tant qu’habitant du pays des vents, il éveillerait forcément l’attention du musicien, et ce dernier viendrait probablement se placer sur sa route. Ainsi, le jeune homme se résolut à attendre son intervention, afin de dévoiler les raisons de sa venue en ce pays.
 

Un ninja ne peut se permettre de laisser circuler librement un étranger dans son pays. Avec certitude, Haiko avait profité de cet état de fait, et le mystérieux musicien était ainsi venu à sa rencontre. Un homme de fière allure, les doigts serrant la poignée de son katana en guise de menace. Il était méfiant. Quoi de plus normal ? La formation d’une Alliance ne suffisait pas à enterrer les vieilles habitudes. Inconsciemment, le Sunajin réagit, saisissant un parchemin dans les tréfonds de sa manche; si la situation se gâtait, il pourrait en faire jaillir quelques armes. Néanmoins, de telles menaces étaient instinctives, et ne reflétaient que légèrement les véritables intentions de nos protagonistes. L’Iwajin ne souhaitait que prendre connaissance de certains faits, ce dont l’enfant des cendres allait parfaitement s’acquitter.

« Je suis Haiko, du clan Yadomaru, Juunin de Suna. », déclara le jeune homme, paré d’un sourire dont il savait si bien les faire.

Nul doute que ces informations n’intéressaient guère l’épéiste; pour lui, il ne devait s’agir que de mettre un nom sur un visage. Toutefois, il s’agissait d’un rite auquel le Juunin ne pouvait se déroger.

« Je souhaiterai accéder aux archives du village d’Iwa, afin d’y mener quelques recherches dont l’objet serait, pour vous, particulièrement dénué d’importance », ajouta-t-il, toujours souriant.

La joie paraissant ainsi sur son visage, la pilule passait toujours plus aisément; le Shinobi le savait, et faisait de son mieux afin de le mettre en œuvre. Bien entendu, la méfiance dont faisait preuve son interlocuteur n’allait pas s’estomper pour si peu, cependant, il s’agissait désormais d’une lutte persuasive, où la meilleure issue du Yadomaru était la victoire. Tout point était bon à prendre, et si la conversation dégénérait, rien ne devait être laissé au hasard. La poigne du ninja se serra autour de son parchemin d’armes; la perspective d’un combat lui déplaisait, et son regard ne pouvait se détacher de la poignée que tenait fermement son opposant. Ici, Haiko n’était qu’un étranger, et seul le musicien, de par son jugement, pouvait déterminer l’issue de cette conversation.  

 

La fragilité de l’Alliance avait eu raison des espoirs de Haiko. C’est avec assurance, le poing serrant son katana, que l’épéiste avait déclaré ne pas pouvoir satisfaire la demande du Sunajin. La désillusion était rude; la quête du Juunin était-elle vouée à s’arrêter là ? La volonté du jeune homme n’avait jamais été aussi forte depuis la disparition de sa défunte tante; il ne pouvait tout simplement pas repartir les mains vides. Les paroles de son interlocuteur n’effacèrent pas son sourire.

« Je regrette, mais je ne peux me satisfaire de si peu, pas après être venu jusqu’ici. », affirma-t-il, tout en détournant son regard de l’arme du musicien, afin de le planter dans le sien.

Alors que la perspective d’un combat grandissait rapidement, l’enfant des cendres ne pouvait que camper sur ses positions. Sa détermination était devenue telle qu’il faisait désormais face à un ninja du pays des roches, et ce avec une assurance qu’il n’avait pas l’habitude de revêtir. Le Yadomaru n’avait pas envie de se battre, loin de là, mais s’il devenait nécessaire de le faire pour en savoir plus, alors il devrait s’y résigner.

« Je vous assure que mes motivations sont loin d’être porteuses de risque; ce que je recherche va uniquement dans mon intérêt, le reste ne m’importe que peu. », ajouta-t-il, tout en grattant son crâne de sa main non-armée, exprimant un certain sentiment de gêne.

Le Shinobi se doutait bien que vaincre son opposant ne suffirait pas à atteindre ses objectifs; il était prêt à tout, mais annihiler le village d’Iwa était loin d’être une solution, et encore moins un acte réalisable. Convaincre l’Iwajin de la justesse de sa cause était probablement la meilleure solution pour parvenir à ses fins, mais ce dernier semblait, sur ce point, tout aussi déterminé que le Juunin du village des sables. La situation avait beau paraître désespérée, la seule pensée de son clan suffisait à rendre confiance à l’enfant des cendres; après tout, son intérêt, ainsi que celui des Yadomaru, convergeaient.