Kid Cudi - Cudi Zone ♫

Le silence règne gentiment dans la pièce qui me sert de chambre. Il y a déjà quelques minutes que je me suis réveillé, m'extirpant de mes rêves oubliés il n'en reste pas moins de fatigue accablant mon être. Presque incapable de me déplacer sans trop geindre j'avais décidé de flâner un instant. Emmitouflé dans ma couverture, sur e côté, le bras bloquant ma tête sur l'oreiller je gardais mes yeux fermés rêvant un instant de replonger dans le sommeil. De me faire lentement accueillir dans les bras de Morphée, tomber encore un peu dans ce monde imaginaire qui était le mien. Malgré l'envie tiraillante de ne rien faire, cela ne me ressemblait pas réellement. Ces deux années de paisible quotidien pesaient un peu sur mon existence qui avait trop souvent été bousculée par les aléas de ce qu'on appellerait la malédiction des Uchiha. Je m'étais retiré un instant et je profitais de mes derniers jours de tranquillité. Oui, c'était certainement les derniers que je passerais à flâner sans conséquences. J'en ressentais déjà les méandres, il fallait, qu'en plus de reprendre un entraînement plus intensif que je me mette en quête de ce que pouvait m'offrir mon choix de liberté. J'aurais bien pu choisir cette retraite aisée et n'agir qu'en besoin mais ce n'était pas ce que je voulais réellement. J'avais besoin de marquer ma renommée, de doucement écrire le nom des Uchiha dans autre chose que des massacres et des mauvais souvenirs faisant trop souvent surface. Je souhaitais vraiment mettre en place une nouvelle ère, un Nouveau Monde. Et comme on le disait souvent, l'avenir appartenait à ceux qui se levait tôt. Il ne fallait pas être feignant et j'étais bien loin de l'être, simplement, cet paisible air m'envahissait l'esprit et je me sentais si calme, si zen lorsque je me surprenais à ne rien faire. Me redressant sur le dos pour cette fois poser mon bras sur mon front j'ouvrais délicatement mes paupières pour laisser mes pupilles toujours aussi sombres apparaître. Une longue respiration laissait s'échapper un soupir qui avait pour but de me donner un peu d'entrain. Sans succès je laissais les faisceaux lumineux du matin frapper mes yeux et réchauffer ma peau. Ne pouvant échapper à ma nature, il était désormais écrit que j'allais devoir me bouger. Levant mon corps las, je fonçais terminer mon réveil sous une douche d'eau brûlante avant de m'habiller avec mon habituel accoutrement. Prenant le thé pour parachever cette matinée, il était désormais utile d'occuper le reste de mon temps, et je savais déjà comment.

Je profitais de l'absence de Madara dans cette pièce pour aller jeter un œil sur Nëssa. Juste m'assurer qu'elle ne manquait dans rien dans ce jour sans. Remplaçant le linge tiède sur son front j'échappais à ma surveillance lorsque mon ancêtre revenait dans la maison que l'on partageait. Toujours dans un silence régnant depuis mon réveil, j'échappais cette habitude pour prendre l'air. Rêvasser à ma manière, me balader un moment, juste me sortir de cette lassitude qui faisait de mon quotidien une boucle infinie. Je ne pourrais dire que je ne me plaisais pas de cette discrétion, de ce petit train de vie mais j'avais toujours été un homme d'action, quelqu'un qui avait son rôle à jouer et c'était bien quelque chose qui me manquait. Je revenais sur mes pas, n'osant de nouveau déranger mon monde et ne sachant même pas comment exposer ma décision, ma pulsion nostalgique, je laissais un mot sur mon départ de quelques jours. Je reviendrais vite, c'était certain, il m'était impossible d'abandonner Nëssa pour le moment, surtout que mes plans n'avaient encore aucune forme. Mais j'avais besoin de cet éloignement, je voulais voir quelque chose, je voulais me rendre quelque part, juste contempler le désastre que j'avais orchestré. C'est donc ainsi que je m'armais de mon katana à ma ceinture, que je prévoyais quelques provisions et que je fuyais rapidement vers Kiri. J'aurais pu employer un faucon pour y voler mais je me disais qu'un peu d'exercice ne me ferait pas que du mal. Puis à quoi bon déranger mon faucon pour si peu. Quoiqu'il en était, je voulais voir une fois ce Kiri. Ce village que j'avais détruis, ces affrontements et ces retrouvailles avec Itachi avant qu'il ne m'ouvre les yeux. Bref, je voulais sentir cette culpabilité en moi, savoir s'il m'était possible encore de ressentir une telle chose.

J'entamais la route alors que je me trouvais toujours dans cette confusion la plus totale. Pouvais-je me pardonner ? Pouvais-je pardonner à Konoha ? A toutes ces personnes qui ne veulent que manipuler mes désirs pour les leurs ? Je ne savais plus réellement où j'en étais et ces deux années n'avaient rien arrangé réellement. Je savais que Kiri aujourd'hui fleurissait à nouveau, du moins, se remettait sur cette voie mais j'avais besoin de sentir l'ambiance de ce village que j'avais il n'y a pas si longtemps détruit. Et c'est donc ainsi que les journées passaient devant moi, notre maison secrètement cachée n'était qu'à quelques jours de chaque village. Enfin près de la finalité de mon périple, aux frontières du Pays en plein dans la Forêt Brumeuse, alors que quelques souvenirs d'une époque révolue s'envolaient lentement de mon esprit, je fus extirpé de mes songes et de la tranquillité de mes pas par des gémissements. Curiosité oblige, je cachais mon corps et mon visage d'une longue cape dotée d'une capuche pour m'approcher lentement de la source du bruit. De nature prudent, je pensais d'abord à une menace possible, mais j'étais trop méfiant, à ma grande surprise une scène peu commune se dévoilait sous mon regard et mon visage toujours aussi inexpressif. Pourquoi ne pouvais-je pas ressentir comme Naruto une once de compassion pour une personne inconnue ? Je connaissais l'inquiétude et la perte, j'avais ressenti des sentiments tous plus horrible les uns que les autres mais je n'arrivais toujours pas à ce que l'empathie s'ouvre à moi. Je n'arrivais pas à me remettre vraiment ne question, à ne pas trouver des centaines d'excuses pour mes actes, mes pensées, mes buts, tout. Je ne pouvais qu'aboutir à la réalisation de ce que je définissais comme juste. Je ne voyais que ma logique, m'échappant à toutes celles des autres.

Ainsi je regardais cette jeune demoiselle, entourée de ses bras, dans un piteux état psychologique. Semblant être en train de pleurer, de s'apitoyer sur son sort, je ne voyais en elle qu'une certaine faiblesse ne sachant pas vraiment ce qu'il lui était arrivé ça restait ma première impression toujours si habituelle et handicapante. Alors que je comptais fuir ce qui vraisemblablement ne me concernait pas une question s'immisçait dans mon esprit et lâcha une idée saugrenue. Que ferais ce nigaud de Naruto dans une telle situation ? Loin de moi l'idée de vouloir ressembler à cet agaçant blondinet trop têtu et trop joyeux mais ces quelques jours n'avaient été remplis que de nostalgie et de remise en question idiote. Je me souvenais de ce que me disait Itachi. J'arrivais à me trouver borné, il fallait bien que je me rende à l'évidence, mais, mon petit voyage était là pour me remettre les idées en place, pour voir si je pouvais regarder le village de Kiri et ressentir une étrange sensation, si je pouvais réussir à me pardonner du passé et de ce temps où la naïveté m'avait encombré, où la vengeance m'avait aveuglé. Et donc, dans un soupir énervé par ce que j'allais devoir faire, je revenais à nouveau sur mes pas, sortant des buissons pour avancer doucement vers la demoiselle en détresse.

« Pourquoi pleures-tu ? »

Direct, habituellement dans un ton froid et en ayant gardé mes distances tout de même, je me tenais debout face à elle, caché sous cette capuche. J'essayais autre chose, j'essayais ce côté social qui n'avait même pas l'ombre d'une occupation en moi. Après tout, pourquoi pas ? Ce n'était pas que ça m'intéressait réellement, du tout, c'était une idée qui était venue, une idée qui me disait que peut être ça aiderait ma quête de rédemption en essayant quelque chose de nouveau, un terrain inconnu, un terrain qui semblait si bien réussir aux personnes m'entourant. Cela devrait m'aider pour l'avenir, pour mon Nouveau Monde et peut être, même, pour m'aider à atteindre ce monstre silencieux de Madara.

Passenger- Caravan ♫

Abnégation, gentillesse, altruisme, joie, tant de choses qui ne pourraient pas me qualifier. Je n'avais jamais réussi à voir autrement que par ma propre logique. À vrai dire, c'est sans réellement me rendre compte que j'agissais dans un pur égocentrisme. Pour moi chaque faits et gestes se poursuivaient dans une logique et une justice qui m'était propre et qui me semblait légitime et imposable à tous. Dans l'erreur j'avais néanmoins encore du mal à faire autrement, après tout je n'avais jamais réussi à trouver ma rédemption tant désirée et ça me bloquait encore et toujours dans cette bulle qui me retenait. Ainsi par toutes ces réflexions qui parsemaient mon esprit, qui sans cesse revenaient à la charge et qui accaparaient mes pensées, je décidais de changer de méthode juste cette fois. Juste aujourd'hui, pour une seule et unique action. Sans vraiment savoir à quoi m'attendre ni même comment je pourrais appréhender la suite, je m'étais élancé dans ce genre d'attention loin d'être mon habitude. Cela ne me ressemblait pas réellement, c'était vraiment la manière exprimée par Naruto, cette compassion, cet altruisme aveugle qui laissait place à une confiance immédiate dès un regard. Cela avait trop peu payé dans mon existence que je n'avais osé accorder une confiance rapidement. Nëssa restait toujours l'exception qui confirmait cette règle, elle était toujours ce pic inhabituel qui se profilait sur la longue route de mon passé houleux. Bref, j'entrais sans connaissance de cause dans une situation et une conversation qui ne m'étaient pas communes. Jugées habituellement par stériles et peu enrichissantes, j'essayais de changer ma vision légèrement sur ce genre de chose. Aujourd'hui cela se présentait et c'était bien ma veine à ce moment d'insécurité sur ma personne et cette période de remise en question. N'osant somme toute pas montrer mon visage, c'est sous ma capuche et à une distance raisonnable pour laisser ma part méfiante tout de même encore actif que j'annonçais ma présence vraisemblablement pas repérée.

De là, la jeune demoiselle en détresse laissait sa fierté s'exprimer. N'avouant pas qu'elle pleurait et usant d'une excuse bien trop connue pour que même si elle était véridique personne ne pourrait mordre à cette esquive. Ainsi, sachant ce qu'était la fierté et l'orgueil je n'osais placer l'évidence de la situation, préférant la laisser se relever. C'était encore une fois bien ma chance, m'intéresser à un événement totalement extérieur à mes buts, à mes plans et à ma routine pour au final n'avoir aucune réponse. Laissant couler, je la laissais poursuivre alors qu'elle m'interrogeait. Avant de répondre j'essayais de jauger la personne qui me faisait face. Je ne pouvais réprimer cette analyse immédiate que je faisais, toujours à tenter de repérer quelle genre de personne me faisait face. Elle semblait fragile plus qu'autre chose, sa voix douce ne montrait en apparence aucune crainte à avoir. Bien que j'avais toujours su faire face aux apparences trompeuses, j'attendais un peu de pouvoir la connaître plus en profondeur avant de me prononcer réellement, décidant de répondre d'un ton neutre.

« Disons que je suis là pour chasser mes démons, je me dirige vers le village de Kiri. »

Le regard toujours enfouie dans la capuche sombre qui acculait mon visage, je restais évasif quant à mes intentions. Par la suite elle me semblait maladroite, se cognant la tête. Ne sachant toujours pas comment poursuivre l'attention que je voulais lui porter c'était un peu dans mes habitudes que je continuais à jauger mon interlocutrice. Cherchant un bandeau ninja, je n'arrivais pas à voir si elle faisait partit du monde des Shinobis ou si elle n'était qu'une civile. Ne voulais activer mes yeux pour faciliter les choses je me laissais porter par les choses et pour une fois j'essayais de ma faire par la surprise et l'inattendue. Les aléas de la vie comme on disait si bien. Ainsi je regardais le spectacle de vivacité qu'elle m'offrait, sans réactions particulières, je retentais ma chance.

« Tu es sûre que ça va ? »

La laissant reprendre ses esprits et écoutant ce qu'elle avait à me dire, je ne pouvais qu'avoir une nostalgie et une certaine culpabilité sur ce qu'elle racontait. Haine, colère, règne, violence, peur, mépris, chaos voilà par contre des termes qui pouvaient s'apparenter à ma personne. Avais-je déclenché tout ça ? Je ne pus que détourner un peu le regard et alors que j'allais prendre la parole elle reprenait. Cette fois c'est un léger étonnement qui s'affichait sur le bas de mon visage, seule partie visible. Le bon en moi ? Comment pouvait-elle dire ça ? Bien qu'elle ne connaissait pas elle avait trouvé la conviction qu'une certaine bonté pouvait se trouver en moi. Reconnaissant bien les manières de mon ancien compagnon, je reprenais à mon tour.

« Ce que j'ai de bon ? Comment peux-tu savoir que j'ai du bon ? »

Je cherchais des réponses et aussi irrationnel que cela pouvait paraître de demander à une inconnue des questions que moi-même je n'arrivais à trouver de réponses plausibles, je m'adonnais à ces nouveautés.

« De toute manière mon choix est fait. Je dois aller à Kiri.. »

Avançant de quelques pas, rien ne pourrait m'arrêter, il fallait que je vois cette terreur, ces ténèbres que j'avais probablement provoqué. Je devais me rendre compte des dégâts que j'avais causé, de mes actes, c'était l'unique voie de la rédemption que je me devais de trouver et Kiri semblait être ma première étape.  

Dead Man's Bones - Werewolf Heart ♫

Sa réaction, ses mots, ce ton charmant sur lequel ses paroles dansaient, c'était effectivement un tout qui arrivait à écorcher mon calme presque légendaire. Mon courage ? Le fait d'aborder la détresse ? De combattre ses démons ? Cela faisait vraiment de moi une bonne personne ? Je ne pouvais concevoir que ça s'apparentait à du bon en moi, après tout, on pouvait y voir de l'entêtement, de la stupidité et de l'empressement. Les deux côtés d'une même pièce dira-t-on. Quoiqu'il en soit, je compris à la teinte rosée de ses joues qu'il ne fallait mieux pas continuer sur ce terrain là. Elle ne pouvait pas faire tout ça, et c'était donc pour elle une admiration à mon égard, ce qui raccordait bien avec cette notion de « bon ». Je fus donc surpris de me rendre à l'évidence, à cette réalité qui m'arrachait de mes habitudes. Voilà que je m'étais intéressé à quelqu'un sans réel intérêt et que le retour des choses semblaient agréables. Ce n'était pas dans ma routine, dans cette façon de penser et réfléchir qui m'était si habituelle je ne trouvais jamais cette vérité si désirable. La vérité. Voilà ce que je cherchais surtout, voilà ce que je voulais savoir, ce qui m'était indispensable. Mon cheminement de réflexion m'avait amené à cette seule et unique réponse, au fait indéniable que pour trouver la paix, la rédemption, et engager mes idéaux il fallait d'abord que mon passé houleux et terrifiant ne soit plus mon éternel fardeau. Il fallait en découdre avec ce qui me retenait tant, cet arrière-goût de haine et de défaite, comment pouvais-je me pardonner si je n'arrivais déjà pas à passer outre les fautes des autres ?

Je restais silencieux à la fin de ce qu'elle disait. Je ne voulais pas poursuivre, ce n'était pas prudent de toute manière. Je ne devais pas me dévoiler, mon but était de voir si cette jeune fille allait bien, et j'avais rempli l'objectif. Mais était-ce réellement seulement ça ? Ne devais-je pas offrir mon aide à cette détresse flagrante qui brillait dans ses yeux ? Que ferait-il dans une telle situation ? Je ne voulais pas non plus trop m'avancer dans ce côté social qui n'existe pas vraiment en moi. Malgré tout je devais me rendre compte des effets pervers qu'une simple discussion pouvait avoir. Effectivement, quelques mots et déjà, j'arrivais à me remettre les idées en place, à faire une rétrospection de mon existence et chasser le surplus de réflexion qui, sans cesse, embrouille mes idées claires. Un soupire s'extirpa d'entre mes lèvres alors que je réalisais qu'il n'était pas si mauvais de porter une attention à une personne. J'avais toujours eu en moi ce côté jovial et juvénile qui souhaiterait sortir et que je retenais, et sûrement retiendrais à jamais. Lorsque je me retrouve dans une situation où la haine, la vengeance, la crainte, et toute cette noirceur qui anime mon âme n'a pas sa place, je ne peux m'empêcher de repenser à cette lointaine enfance. Ces moments partagés avec Itachi, ces instants perdus et envolés, fractionnés dans les méandres de mes pauvres et faibles souvenirs reviennent inlassablement hanter mon esprit ténébreux. Je me revois, sourire aux lèvres, courir, jouer, sauter, cette image de moi gamin simplement heureux de vivre. Je revois cette bonne humeur qui ne disparaît pas de mon visage, ce frère aimant qui se joue gentiment de moi, ces bons moments qui me poussent à imaginer ce que ma vie serait devenue sans toute cette obscurité, tous ces instants détruits, ces bons souvenirs volant en éclats, cette enivrante haine. Il m'arrive également de penser à cette période à Konoha, mes débuts de ninja, là où je fus presque embarqué dans une routine sociale. Il m'avait semblé parfois presque oublier mon but et me laisser aller dans l'ambiance de notre team 7. Là encore je me demande si je n'avais pas trouvé ma place et que je l'ai quitté pour pourchasser mes moulins à vents, il m'arrive aussi de m'imaginer rester au village et perdre mes démons lentement, me demandant si mon frère m'aurait laissé m'encroûter ainsi. Il est déroutant de refaire un tour dans ses souvenirs et réaliser à quel point tout est manipulé pour qu'on dérive dans un gouffre sans lumière.

Je réalise que mon regard fixe depuis trop longtemps le vide et je secoue légèrement ma tête pour revenir à la réalité, laissant mes songes derrière moi. Il était amusant de voir les réactions de mon interlocutrice. Sans cesse changeante, elle paraissait comme suffisamment blessée par son existence qu'elle pouvait se forcer à sourire à chaque instant. Elle semblait réussir à trouver le bon et le mauvais dans toutes les situations, et se servir du bon pour prendre le dessus. En démontrait le sourire radieux qu'elle m'offrait après son élan d'optimisme pour l'humanité. Cette fois, je lui répondais.

« Je pense que tu portes trop d'espoir pour des êtres si faibles que nous sommes. »

Un cynisme bien dosé, j'abaissais délicatement un peu plus ma capuche pour pallier à sa curiosité, et je suivais mon choix, commençant à avancer vers Kiri. J'avais rempli ma limite d'irrationalité et je n'avais plus rien à faire ici. Enfin, plus rien qui ne pourrait m'aider à ma rédemption, j'avais essayé mais il était clairement évident que je n'étais pas doué pour ce genre de choses de toute manière. Je faisais quelques pas alors qu'elle me retenait, forçant un peu. Si elle savait que je faisais partie intégrante du malheur de Kiri, que j'avais détruis ce village et battu la Mizukage. Si elle savait à quel point j'étais déjà corrompu et engrainé dans l'abysse obscure du chaos. Bien que je remontais la pente, bien que mes idéaux se bousculaient et que je cherchais quelque part cette vérité qui m'offrirait ma rédemption, j'étais toujours si consumé par les regrets, les remords, ces ressentiments si communs que j'avais appris à vivre avec sans vraiment m'en rendre compte. Rudement accrochée, elle ne lâchait pas prise et je ne pouvais trop forcer sans risquer perdre ma cape qui voilait mon identité. Je n'avais pas le choix, alors j'arrêtais d'avancer, me retournant pour la regarder. Je vus son bandeau Shinobi, accroché autour de son cou, si mon identité se dévoilait je comprenais que j'allais devoir affronter cette jeune fille en détresse. Après ce que j'avais fais endurer au village de Kiri, il était presque indéniable que tous les ninjas du village voudrait me tuer. C'était inévitable après tout, et je ne pouvais que leur donner raison. Alors qu'elle balbutiait, j'en profitais qu'elle soit dans ses songes et son idée pour me défaire vivement de son étreinte. Un revers de main pour détacher son accroche si féroce au tissu, et replacer discrètement la capuche qui avait un peu reculé avec l'agitation. Il n'était vraiment pas opportun pour mon visage de se montrer, non, vraiment pas. Je faisais quelques pas avant de répondre à sa réflexion.

« Tu pourrais ? »

Que voulait-elle demander ? Je n'en savais rien, mais j'avançais maintenant vers Kiri et c'était à elle de décider si elle me suivrait ou pas.   

Coldplay - Fix You (Electus Remix) ♫

J'avançais. Je ne pouvais m'attarder plus longtemps à ressasser des démons qui me rattrapaient bien trop rapidement. J'avais déjà trouvé quelques réponses, quelques désirs, et c'était bien assez surprenant et étrange dans mon quotidien. C'était en réalité la première fois que je choisissais quelque chose de mon plein gré. Il n'y avait rien autour qui avait influencé mon choix, c'était venu d'un désir enfouit. Certes les répercussions de ce désir se trouvait dans mon passé, mais personne n'était venu m'aiguiller vers quelque chose. Il me fallait cette vérité, cette rédemption, ce besoin vital d'être réveillé. Se sortir de ce trop long coma dans lequel j'étais plongé. C'était ironique, tiens, même le Sharingan ne pouvait détruire l'illusion du mensonge dans lequel j'étais enfermé depuis ma naissance. Je n'avais rien pu faire et j'avais subi mes propres erreurs de jugements. Le regrettais-je ? Il m'arrivait parfois de m'imaginer autrement, mais au bout du chemin, me voilà assez puissant, assez mature, assez armé pour m'engager dans cette nouvelle voie, dans cette liberté. Et sans plus attendre, j'avais opté pour mes desseins de Nouveau Monde. Je ne cherchais pas la guerre, ni la paix, à vrai dire je courrais après quelque chose d'encore très abstrait. Rien de bien défini, mais sans aucun doute quelque chose de mieux. J'avais besoin d'espoir, de renouveau, je dirais même de renaissance. Quelque chose qui me tenait à cœur, quelque chose que j'aurais moi-même entrepris et mis en place, quelque de chose de meilleur pour tous. C'est donc ainsi que je m'engageais à travers les arbres de la Forêt Brumeuse, déterminé à entrer dans le village de Kiri. Même avec l'alliance, il ne serait pas si aisé de rentrer dans le village, surtout couvert d'une longue cape sombre et d'une capuche cachant les traits de ma mauvaise célébrité. J'avais bien des solutions qui s'offraient à moi, mais la jeune fille que je venais de rencontrer me suivait. Je n'étais pas particulièrement sur mes gardes, enfin, simplement socialement, du coup je n'avais rien pour me décider du réel danger de celle qui m'accompagnait. Pas du genre à juger sur les apparences je me disais que toute manière j'aurais la puissance et la force nécessaire pour m'en sortir. Malgré tout un sentiment étrange m'envahissait lorsqu'elle reprit la parole.

Je tournais la tête, toujours méfiant sur le dévoilement de mon identité, et je la regardais. Ce n'était pas mon premier contact visuel avec ses yeux et je remarquais la teinte changeante. Que venait-il de se passer ? Je ne pourrais le dire, mais son comportement changea du tout au tout. Sa timidité se transformait en un élan de confiance, sa détresse s'envolait au détriment d'une assurance digne de l'arrogance qui caressait mon être. De plus, elle faisait bien une distinction entre la jeune fille que je venais de rencontrer et cette nouvelle personnalité qui se dévoilait. Intrigué, je la laissais revenir à ma hauteur, je restais silencieux et j'observais simplement. Les mains cachés, je m'attendais à n'importe quoi de sa part, si j'étais confiant face à la première personne que j'avais rencontré, cette nouvelle personne semblait bien plus inquiétante. Je n'en étais pas à me faire du soucis, ou même à craindre un quelconque danger, malgré tout, je ne pouvais savoir aussi facilement si elle était pacifiste ou non. Dès lors, elle montrait avec assurance son bandeau ninja et je pus savoir qu'elle faisait bien partie des troupes de Kiri. Elle était mon entrée gratuite, mon passe pour le village et je voyais enfin l'utilité de rencontrer des inconnus. Elle gagnait en intérêt bien qu'elle exposait avec une confiance aveugle ses plans. Découvrir mon visage ? Je ne la laisserais pas faire d'une part, et se doutait-elle de qui elle avait en face d'elle ? Je ne pense pas. Je ne pus que répondre à ses menaces, elle devenait plus agressive et sereine que sa précédente personne.

« Je ne pense pas qu'il soit dans ton intérêt de découvrir mon visage. »

Ferme et évasif, je voulais lui ôter cette curiosité normale qu'elle avait sûrement développé. Je ne voulais pas qu'elle puisse savoir qui j'étais, encore moins si je me trouvais à Kiri, si elle rameutait du monde, ce serait une mauvaise chose pour moi. Je prenais des risques en revenant ici, surtout après deux ans d'anonymat, si on me savait ou me croisait ici, on commencerait de nouveau à croire que je cherche à mettre l'Alliance en péril. Ce n'était pas réellement mon but, mais je ne pouvais me permettre de telles choses.

On arrivait donc en face de la porte du village et je la laissais opérer. Elle déployait une confiance et une taquinerie sans relâche, osant tout et n'importe quoi, l'absurde prenait le dessus. Je laissais faire pour le moment, ne voulait pas paraître suspect. On pénétrait donc dans Kiri et je pus faire face à la peine que les villageois engendraient face à la destruction pas si vieille que ça. Une tension palpable régnait bien que le village se remettait doucement de la Grande Guerre, Kiri avait toujours été un village chaotique. Mes yeux faisaient le tour des environs et la jeune fille qui m'accompagnait reprit la parole. Elle m'avouait ne pas être une Kunoichi de Haut-Rang, ce qui m'arrangeait à vrai dire, j'aurais moins de mal à ce qu'elle se taise si jamais j'étais découvert. Elle se proposait aussi en tant que guide, et je ne savais pas vraiment si je devais prendre le risque, surtout depuis que sa personnalité avait changé. Elle était instable et trop curieuse. Alors que je m'apprêtais à refuser, une voix plus douce vint perturber mon élan de discussion. Ses yeux reprirent leur ancienne couleur et elle s'excusait. J'avouais préférer ça.

« Contentes-toi de retenir la curiosité de ton double et ça ira. Je vais par là. »

Reprenant une vieille habitude de froideur dans le ton, je montrais du doigt le centre de Kiri, ça me permettra d'aller un peu partout pour voir l'étendue du chaos qui y régnait. J'avançais un peu avant de tourner la tête sur le côté, toujours le haut du visage bien assombrit par la capuche.

« Tu viens ? »

Je me disais qu'il me serait bénéfique d'avoir quelqu'un à mes côtés, je pourrais la questionner sur Kiri, et ça me serait des plus utiles.   

Du Tonc - Darkness ♫

Elle était, en plus d'une utilité sur l'atmosphère régnante à Kiri, une sorte de protection. Je passais plus ou moins inaperçu dans la masse, j'apparaissais comme un voyageur qui n'était pas là pour quoique ce soit d'autre que la solitude. Avec cette jeune demoiselle à mes côtés, je paraissais faire en quelque sorte partie du village, et cela me donnait un crédit suffisant pour qu'on ne s'intéresse pas trop à moi. Le fait d'être accompagné par une personne propre au village était un signe que je ne fouinais pas, et c'était ce qu'il me fallait. La discrétion était d'or, après tout, je ne pouvais ni dévoiler mon visage ni faire de grabuge ici. Ce serait trop mal vu alors que j'étais l'un des bourreaux des malheurs du village. Être responsable et l'assumer était deux choses bien distinctes, alors que je savais reconnaître mon tort, je ne l'assumais pas comme on l'entendait. J'avais mes raisons à ce moment-là, et rien ne pouvait entraver mon chemin. Aujourd'hui, cette espèce de rétrospection me permettait surtout de faire l'étalage de cette logique qui fuyait lentement de mon esprit. Je n'étais plus le même qu'il y a deux ans, et mes ressentiments face à un tel spectacle en étaient bien la preuve. Je ne réfutais pas mes actes, mais je comprenais mon évolution. Ma maturité. Je ne ressentais néanmoins aucune véritable culpabilité. Je n'avais pas honte de ce que j'avais fais, cela avait été nécessaire pour atteindre la personne que j'étais devenu. C'était ainsi, le destin de Kiri avait été scellé et il s'était retrouvé sur ma route. Ma haine avait disparu, mais je ne pouvais oublier les sentiments qui avaient engrangés de telles élans de violence. Je n'oubliais pas ce que j'étais, c'était même la base de ce que je suis. Il fallait avouer que ma rancoeur envers les villages, bien qu'atténuée, n'avait pas disparu. Elle subsistait au même titre que les méandres de ma personnalité toujours aussi froide et distante. Kiri apparaissait comme éteinte, bien que la destruction avait été presque effacée, d'après les dires de celle qui m'accompagnait, le chaos régnait. Je n'avais pu voir l'obscurité du quotidien des villageois, mais je faisais aveuglément confiance en ses paroles. Elle était honnête, elle le semblait en tout cas. Bien que je restais prudent, je savais qu'elle ne tenterait rien tant que ces yeux restaient de cette couleur. Son dédoublement de personnalité était plus gênant, et c'est pour cela que je restais méfiant et que je gardais cette distance entre nous. Je n'étais de toute manière pas du genre à tisser des liens. Je venais de m'y essayer et cela n'avait pas réellement fonctionné. J'avais compris quelques petites choses, et cela m'avait permis d'avancer plus rapidement, et dans une bulle de sécurité plus imposante, mais rien de plus. Et cela ne me donnait pas tellement envie non plus. Je ne voulais pas avoir des liens partout dans le monde, des amis, cela ne m'avait encore que trop peu servi vraiment. Des camarades, voilà ce à quoi tout le monde s'apparentait pour moi. Quelques exceptions, mais rien de très fort de mon côté. J'avais énormément à apprendre et de choses à changer avant que je puisse prétendre m'investir équitablement dans une quelconque relation amicale. Je n'étais pas prêt.

Elle avait donc décidé de me suivre. Elle et ses yeux jaunes. Sa présence ne me gênait pas, à vrai dire, elle n'était pas trop curieuse et ça m'arrangeait. Elle avait ce côté naïf qui l'avait amené à me faire entrer dans le village sans même me connaître. La jeune demoiselle n'avait aucune information sur moi, simplement des pressentiments. Elle avait fait confiance à son instinct mais elle ne mesurait pas le risque qu'elle faisait courir à son village. J'étais là pour des raisons pacifistes, mais cela aurait très bien pu être l'inverse. Quoiqu'il en soit, ça m'arrangeait bien de toute manière. L'autre personnalité qui semblait habiter son corps me gênait beaucoup plus. Imprévisible, curieuse, elle était définitivement plus vicieuse que celle que j'avais à côté de moi. La demoiselle aux yeux rouges étaient bien plus dangereuse que l'autre, elle pouvait vouloir tirer sur la capuche qui voile le mystère sur mon visage, elle pouvait décider de ne plus être si passive, et cela m'obligeait à rester prudent. C'était une personne instable et stable à la fois, c'était assez perturbant, mais j'avais besoin de sa compagnie de toute manière. Je faisais avec.

On marchait l'un à côté de l'autre, alors que la rue s'enfonçait jusqu'au centre ville. Toujours planqué sous mon manteau noir, elle brisa le silence dans un avertissement. Je souriais doucement, discrètement. Je n'avais vraiment aucune peur ou aucune crainte. J'éviterais le combat mais quoiqu'il arrivait, je pourrais m'en sortir. Je détestais fuir, mais je ne faisais pas forcément le poids contre la totalité du village. J'étais réaliste sur mes capacités et j'avais une bonne analyse des situations. Je répondais simplement, avec négligence.

« Tu n'as pas à t'en faire. Je ne donnerais aucun motif. »

Aussi simple que ça, il me suffisait d'éviter chaque personne. Je n'étais pas là pour du tourisme ou faire du social. J'étais pour moi, j'avais besoin de ce passage pour me rendre compte de l'évolution que j'avais fais lors de ces deux années de tranquillité. De plus, Kiri était ma passerelle face à des questions qui restaient en suspend dans mon esprit. Je voulais me les remémorer et chercher à comprendre ce qu'il me fallait pour la rédemption que je souhaitais. Je ne voulais pas être tapis dans une cachette, je voulais cet air frais d'un vent libérateur, je voulais exaucer mes désirs de liberté. Rien de plus pour le moment.

Elle arrivait toujours à sourire malgré la souffrance qui se dégageait de son regard et de ses mots. C'était quelque peu déroutant de voir tant d'entrain alors que visiblement elle était des plus blessée par la situation de son village. Je me renseignais, doucement, intrigué.

« Ne haïs-tu pas ceux qui ont fait ça à ton village ? »

Je voulais savoir ma position vis-à-vis du village. Si elle citait mon nom je ne pourrais que comprendre la rancoeur toujours existante ici. Puis je reprenais.

« Ne cherches-tu pas à te venger ? As-tu déjà ressenti ce besoin viscéral de faire quelque chose ? Qu'un sentiment de colère te contrôle tant que tu es rongé par ces artifices négatifs ? »

Je me perdais un peu dans mes révélations alors qu'on atteignait le centre ville. J'observais les alentours et je répondais à sa dernière question.

« As-tu déjà eu le sentiment vide de savoir qu'il faudrait ressentir quelque chose mais d'être incapable de le ressentir ? »

C'était ce qu'il m'arrivait. Je savais que je devais ressentir de la gêne, de la honte, de la culpabilité, quelque chose dans ce goût là, mais rien ne venait à moi. J'étais impassible. L'évolution était peut-être le fait de s'en rendre compte ? Je n'en savais rien, mais je savais que Kiri n'avait pas la réponse que je cherchais tant.